mardi 27 avril 2010

Ca sent la fin (snif? snif.)


Depuis plus d’une semaine, la connexion internet est coupée dans notre immeuble. Je me connecte depuis l’école, quand j’ai un moment. J’aurais eu beaucoup de mal à me faire à cette situation il y a 2 mois. Mais à 4 jours du départ, ça me semble moins grave.

Malgré qu’ils soient en majorité remplis par la pièce de théâtre, les derniers jours se suivent et ne se ressemblent pas. J’ai été malade pour mon dernier dimanche à Dhampur, et bizarrement, ça ne m’a pas embêté plus que ça. C’est ennuyeux bien sûr, mais en étant fataliste, c’est tellement indien de tomber malade comme ça, sans prévenir !
Je me suis fait violence pour accompagner Natalia, Rahul et Gautam lors de la sortie matinale au temple, parce que je savais que ce serait la dernière. J’avais beau être crampée (à ne pas confondre avec l’expression québécoise être crampée, qui signifierait que j’étais morte de rire, ce qui était loin d’être le cas), j’ai quand même réussi à apprécier la balade à vélo sur le porte-bagage de Rahul, le cadre paisible de ce temple en plein air, la fabuleuse atmosphère communautaire de tous ces gens unis dans leurs prières. La seule chose dont je n’ai pas profité, c’est le repas servi gratuitement à tout pèlerin dominical. 


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J’ai toujours autant d’horreurs à dire sur les moustiques. Ils m’aiment et je les déteste. L’autre jour, dans la salle informatique, mon bras gauche a servi de terrain de chasse pour une démonstration de père en fils. Le plus gros moustique a piqué le premier, sur le coude. Le plus petit s’est empressé de suivre l’exemple, plantant son dard dans de la chair plus tendre. « Comme ça papa ? » Si seulement il avait été trop gourmand, il aurait été trop lourd pour redécoller, et je l’aurais eu. Mais il a dégusté son repas rapidement et est parti digérer plus loin.
Ce soir dans la cuisine, j’ai eu affaire à des vicieux. Ils ont attendu que je sois en train de verser le lait bouillant dans la bouteille à travers une passoire pour se poser en bande sur mes poignets et bras. Evidemment ils avaient bien calculé leur coup, ils savaient que si je bougeais je renverserais le lait par terre. Mais ce qu’ils ignoraient, c’est que je suis incapable de laisser un moustique m’atterrir dessus et lui souhaiter bon appétit. Si je te vois, je te choppe, tant pis pour le lait ! Ceci dit ils ont dû se dire la même chose, parce qu’on est resté à égalité.
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Depuis que nous travaillons jour et (presque) nuit sur la pièce de théâtre, nous avons décidé de refaire appel au service de cantine qui s’est occupé de nos repas lors de notre arrivée. D’une on n’a plus le temps de cuisiner, de deux on est incapable de cuisiner indien (je sais, quelle honte) et croyez-le ou non, leurs épices commençaient à nous manquer cruellement !
Au passage, pour ceux qui m'embêtent encore avec leurs doutes quant à mon allergie/dégoût pour la coriandre, ce lien est pour vous: http://www.nytimes.com/2010/04/14/dining/14curious.html
L’autre soir nous avons pique-niqué dans la salle d’art où nous peignons les décors, avec Rahul et Gautam. Nous testions les spots d’éclairage pour le spectacle, et la soirée s’est vite transformée en Shadow Dinner.


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Dhampur aussi a sa fête foraine, avec stands de tir et manèges. Comme cette roue, aux couleurs du drapeau indien, dont la structure est sûrement plus vieille que la grand-mère édentée qui vend les tickets d’entrée. Je me demande encore comment elle fonctionne (la roue, pas la grand-mère, quoique...)  J’ai cherché le moteur, mais n’ai trouvé ni engin, ni câble. Vu la vitesse à laquelle elle tournait, ils devaient être une bonne douzaine à pédaler !  (là encore, je parle de la roue bien sûr). Je vous entends d’ici « mais pourquoi diable t’es-tu sentie obligée de monter là-dedans ? » Vous souvenez-vous de ma description de la procession de danseurs qui nous aspirent lors des mariages ? J’avais à peu près autant le choix de monter dans une nacelle que d'éviter la foule lors de ces marées humaines.


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La collocation a ses avantages et ses inconvenients, on le sait tous. Et je trouve que la communication par frigo interposé a son charme, comme ce petit message m’indiquant que le lait a été bouilli (et que je peux donc m’en servir pour mes céréales). On voit aussi que notre frigo est d’un vert improbable. Enfin on peut se demander ce que fait la chaise devant le frigo (et on aurait raison). Elle sert à dissuader les singes de venir se servir sur nos étagères. C’est arrivé un peu trop souvent ces derniers temps, et on en a eu franchement ras le bol de retourner au marché tous les jours faire le plein de tomates, concombres, bananes, mangues…


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Presque un mois déjà que je nageais plus d’une heure quotidiennement. Je n’avais pas raté un jour, et sans m’en rendre compte j’étais devenue complètement accro à ma pause natation. Depuis dimanche je suis en désintox, puisque la piscine a été vidée pour nettoyage. Je n'ai pas bien saisi ce qu'ils nettoient, nous la trouvions tous très propre, mais le fait est qu’elle restera fermée quelques jours encore, et que ça m’a provoqué une crise de manque intense cet après-midi. Après 5 minutes à barboter dans mon seau, l’inconfort a pris le dessus et j’ai compensé par une séance de yoga, ayant cruellement besoin de mon « shoot » de sport.


mercredi 21 avril 2010

Heureux: E, R, E


« Sandie, est-ce que je peux te demander quelque chose ? » Lakshmi est en train de cuisiner. Ses ingrédients et ustensiles sont alignés sur le comptoir, une casserole de lait frémit à feu doux. Alors qu’elle coupe une gousse d’ail, elle se tourne vers moi. « Comment fais-tu pour avoir l’air tout le temps heureuse ? » La question me désempare, et me flatte. C’est un des plus beaux compliments qu’on puisse me faire en ce moment. Et dire qu’il y a à peine quelques jours, j’en étais à me demander si l’équipe toute entière ne me détestait pas. J’ai l’impression d’être sans arrêt en train de les embêter ou leur poser des problèmes avec mes requêtes pour la mise en scène de la pièce de théâtre. Visiblement j’ai été capable de masquer mes éclats de frustration, et Lakshmi confirme « je ne t’ai jamais vu avec une expression triste ». Je ne trouve qu’une réponse logique « si j’ai l’air heureuse, c’est que je le suis, je suppose :-) ».



samedi 17 avril 2010

WoOz Indian style


J’y pense toute la journée, j’en rêve la nuit. J’ai les chansons coincées dans la tête, je connais les dialogues par cœur. Je le chante, je le récite, je le décore, je le peins, je l’accessoirise, je l’habille, je l’éclaire, je le mets en scène. J’avais une vague idée du travail que ça représentait, mais j’étais loin de m’imaginer ce que ça coûterait. Pas en roupies, mais en énergie !

Dans 10 jours, on présente WoOz (the Wizard of Oz). Il y a deux jours, nous avions à peine commencé à peindre le premier décor, nous n’avions aucun costume, et certains des rôles principaux ne connaissaient toujours pas leurs lignes. Je m’arrachais les cheveux (si seulement ça pouvait être ceux qui sont restés rose depuis Holi), et toute l’énergie que je déployais me semblait perdue. En l’espace de deux jours, on a fait des progrès considérables, et j’ai repris confiance. Je déploie toujours autant d’énergie, mais maintenant elle m’apparait exponentielle.

Monter un spectacle de A à Z est une expérience formidable, surtout quand on fabrique au lieu d’acheter. Hier en retournant vers ma chambre, je suis passée devant le hangar dans lequel travaille le charpentier, et j’ai vu se dresser devant moi la porte que j’avais dessiné, dont j’ai besoin pour un décor. A partir de là j’ai vu que mes efforts aboutissaient, et je me suis sentie revigorée.

Aujourd’hui j’ai eu rendez-vous avec le tailleur, qui va façonner les 16 costumes que j’ai dessiné avec le tissu que j’ai acheté, et le monteur de la scène, qui installe une estrade, des coulisses et des escaliers selon mes instructions dans un décor naturel. Natalia a écrit et composé la musique. Elle travaille à présent avec les rôles principaux pour leurs solos et avec les classes entières pour quelques morceaux en chorale. Nous avons la majorité des accessoires, et une date pour les tests de son et éclairage. Les enfants n’ont plus besoin du script pour travailler, et ils commencent à connaître leurs déplacements. Quand le petit public qui assistait à la dernière répétition a ri pendant une scène, j’en ai eu des frissons. Alleluja ! Il reste beaucoup à faire, mais puisqu’on la joue Indian Style, 10 jours devraient suffire ! 

 
(Pour ceux qui se demandaient encore, après 4 mois, ce que je pouvais bien fabriquer en Inde, maintenant vous savez !)

jeudi 8 avril 2010

De...à...


Il court dans le couloir, suivi de quatre de ses camarades. La feuille qu’il serre dans sa main est froissée. Quelqu’un finit par la lui arracher. Puis quelqu’un d’autre. Puis moi. Je déplie la feuille, et sans même la lire, je prétends réagir à une lettre d’amour. Le groupe éclate de rire, mais quand je tourne la tête je m’aperçois qu’elle, au fond de la classe, ne rit pas. Elle me lance même un regard qui veut dire « ce n’est pas drôle du tout ». Oh la boulette. Ca fait un bout de temps pour moi, les bouts de papier qui circulent en classe. Se pourrait-il vraiment que Varun ait écrit une lettre d’amour à Anshuma ? N’est-ce pas étrange à douze ans, alors qu’il en parait 8 et elle 14 ? Aïe le coup de vieux. En y repensant bien, je crois que j’étais déjà experte en lettres d’amour à 12 ans. Cela dit la lettre ne dévoile pas de sentiments, elle dit juste : « De Varun à Anshuma : je suis désolé, reparle-moi s’il te plaît, vraiment désolé désolé ». Puis, plus bas « de Anshuma à Varun : pourquoi ? ». Varun a l’air embêté, mais il garde le sourire. Quand je prends Anshuma à l’écart, elle a les larmes aux yeux. Impossible de savoir ce qu’il s’est passé, mais je déchiffre que Varun aurait été insultant, et que depuis Anshuma ne veut plus lui parler. Du coup ils communiquent par papier interposé.
J’explique à Anshuma que si Varun s’excuse, il faut lui laisser une chance de se rattraper. Elle consent à acquiescer, mais je sens bien que c’est la réponse d’une élève à une prof…A cet instant, j’ai envie de porter le même uniforme qu’elle, l’agripper par les épaules et l’emmener se réfugier aux toilettes en lui disant « T’inquiète, tout’ façon c’est qu’un débile mental, j’suis sûre qu’il fait encore pipi au lit. » J’y songe un instant, mais je suis résolument trop grande (si si…), et pas assez experte en Hindi. Je retourne donc à ma position de prof, ne serait-ce que parce qu’il faut que je trouve un moyen de sauver l’ambiance de mes répétitions ! Que va devenir le Magicien d’Oz si Dorothy ne parle plus à Tinman ?


lundi 5 avril 2010

Embrouille à l'indienne


Quand on découvre une culture, il est aussi fascinant de voir les gens rire et comprendre leur humour que les voir se quereller et comprendre leur manière de gérer un conflit. En revenant d’Haridwar, j’ai été réveillée par une belle prise de bec entre Gautam et le « caissier » du bus, qui lui a imposé un supplément juste avant de nous déposer, sûrement parce qu’il accompagnait deux étrangères. J’ai trouvé que le hindi était une jolie langue pour se fâcher.

Ce week-end nous sommes allés en bande passer la nuit de samedi dans une ferme. Il est sous-entendu que ce genre de rassemblement est accompagné d’une soirée. A minuit, nous avons fêté les 35 ans d’un des professeurs. Après même pas 10 minutes de musique, un des pères de famille qui s’était déjà couché est venu débrancher la sono. Bonjour l’ambiance ! Du coup, de 00h10 à 1h30, la fête a consisté en un gros débat qui opposait le porte-parole des dormeurs, seul, face à une vingtaine de fêtards. Pour mon grand plaisir, la majorité de l’argumentation s’est faite en anglais. Le conflit d’origine (tapage nocturne) a vite laissé place à une multitude de problèmes annexes, tous plus tirés par les cheveux. Un coup c’est l’heure qui est trop tardive, ensuite c’est le choix de la musique (ceci dit, j’avoue que je suis d’accord avec le causeur de trouble sur ce point, aucune heure du jour ou de la nuit n’est propice à passer Shakira). Puisque le chef du clan des fêtards insistait pour que tous les membres participent à la discussion, je me suis permis de glisser un commentaire sur les aléas de la vie en communauté, et sur le fait que chacun était libre de venir ou non à cette sortie…Mon but n’étant pas d’envenimer la situation (quoique ça aurait pu être drôle) je me suis bien gardée de faire remarquer au plaintif que moi je me passerais bien des cris de sa fille à  6h du mat’.

A part ça, la ferme qui se trouvait à la frontière du parc national Jim Corbett était fort agréable, et le dîner préparé à plus de vingt était délicieux :-)

jeudi 1 avril 2010

Wholy wheat!

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Pour aller en ville à pied, on traverse un champ. Jusqu'à la semaine dernière, c'était un champ de cannes à sucre. La récolte ayant eu lieu maintenant, on a perdu nos repères. Mais ça m'a permis de remarquer ce très beau champ de blé, que je n'aurais jamais vu, trop fascinée par les cannes à sucre qui font deux fois ma taille.